La protection du bail d’habitation
La protection du bail d’habitation

La protection du bail d’habitation

La situation

La Commune est propriétaire d’un bâtiment, appartenant à son domaine privé, qui est réparti entre un local, au rez-de-chaussée, et un appartement occupé par un bail d’habitation.

La Commune envisage des travaux sur l’ensemble du bâtiment et s’interroge ainsi sur :

  1. La valeur juridique du bail de 2011 et des avenants successifs ;
  2. Les moyens juridiques à sa disposition pour mener à bien son projet communal ;
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L’AMF du Morbihan vous répond 👇🏽

  1. La valeur juridique du bail de 2011 et des avenants successifs
  • L’intégration du bien communal dans le domaine privé

L’article L2111-1 du CG3P attribue au domaine public les biens affectés à l’usage direct du public ou affectés à un service public dès qu’ils font l'objet d'un aménagement indispensable à l'exécution des missions de ce service public.

L’article L2211-1 du CG3P prolonge en indiquant que tout bien qui ne relève pas du domaine public appartient au domaine privé de la personne publique et est régie par les règles de droit privé.

  • L’application de la loi du 6 juillet 1989

Il est ainsi admis que le local communal appartient au domaine privé et que la location d’un logement du domaine privé communal se fait dans les conditions de droit commun, par la conclusion d’un bail d’habitation, régie par la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 dont les dispositions sont d’ordre public.

La loi n°89-462 du 6 juillet 1989, dans son article 15, prévoit que le délai de préavis applicable au congé, peu importe la justification de la mise en échec du droit de renouvellement, est de six mois. La motivation de la décision doit également répondre à des éléments sérieux et légitimes laissés à la discrétion du juge.

Ainsi, en établissant un bail en octobre 2011, ce dernier est renouvelé, par tacite reconduction, tous les 6 ans.

Le bail d’octobre 2011 est, depuis octobre 2023, renouvelé pour 6 ans et la Commune, personne morale-bailleur, ne peut solliciter le départ du locataire que 6 mois avant la fin du bail, soit en mai 2029.

  • Les avenants réalisés sont, sous réserve de l’appréciation d’un juge, sans valeur juridique.

La loi n°89-462 du 6 juillet 1989, dont les dispositions sont d’ordre public, prévaut sur les avenants.

  1. Les moyens juridiques à sa disposition pour mener à bien son projet communal
  • Le défaut de paiement des loyers

L’article 7 de la loi n°89-462 impose au locataire de régler ses loyers.

Le défaut de paiement du loyer est un motif permettant la mise en œuvre de la clause résolutoire, prévue à l’article 24 de ladite loi : “la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges aux termes convenus ou pour non-versement du dépôt de garantie. Cette clause ne produit effet que six semaines après un commandement de payer demeuré infructueux.”

Cette longue procédure peut être arrêtée dès la régularisation des loyers par le locataire.

  • La convention d’occupation précaire

Au regard du projet de la Commune, un compromis avec le locataire peut être envisagé mais la réalisation d’une convention d’occupation précaire est une possibilité qui présente malgré tout des risques.

Le locataire peut saisir la justice qui, sans motif précis justifiant la convention d’occupation précaire, peut requalifier la convention en bail classique toujours régie par la loi de 1989.

Le préambule de la convention doit être suffisamment exhaustif pour justifier le caractère exceptionnel et temporaire du recours à la convention d’occupation précaire, avec les détails du projet communal.

Si la situation tend à perdurer, que le motif qui justifie la précarité n’est pas réel, le risque de requalification sera important.

Pour information, une Commune peut d’autre part consentir une location à titre exceptionnel et transitoire en vue (article 40 V de la loi du 6 juillet 1989) :

.de louer à des tiers des logements inutilisés et habituellement réservés aux instituteurs ;

.d’héberger des personnes en difficultés temporaires ou sinistrées.

La location n’est alors soumise que partiellement à la loi du 6 juillet 1989. Les dispositions suivantes ne lui sont pas applicables :

.la durée du bail, sa reconduction, son renouvellement (art. 10) ;

.les modalités de congé (sauf celles relatives au congé délivré par le locataire qui s’applique) (art. 15, I, alinéas 13 à 23) ;

.la fixation du loyer au stade de la formation (art. 17) ;

.l’ajustement du loyer lors du renouvellement du bail (art. 17-2).

Les autres dispositions de la loi du 6 juillet 1989 (non citées par l’article 40 V) sont applicables au bail consenti pour des logements loués à titre exceptionnel et transitoire par les communes.

Les liens, ci-dessous, sont à titre indicatif mais peuvent prolonger la réflexion :

  1. https://adil01.org/wp-content/uploads/Lgt_communaux_planche-2-presentation-1er-couverture-droite-puis-livret.pdf (livret réalisé par l’ADIL de l’Ain sur la location des logements appartenant aux communes- décembre 2020)
  2. https://www.senat.fr/questions/base/2000/qSEQ000726807.html
  • Les travaux engagés au sein du bâtiment

L’article 7 de la loi n°89-462 prévoit également que le locataire ne peut pas s’opposer à la préparation et l'exécution de travaux d'amélioration des parties communes ou des parties privatives du même immeuble.

Dès lors, la Commune peut ainsi engager des travaux dans l’appartement tout en conservant le locataire et le local du rez-de-chaussée, non concerné par la loi de 1989, pourra accueillir des travaux.