CAA Marseille, 28 mars 2025, n°24MA00731
Une société civile immobilière est propriétaire d’un immeuble de trois étages, qui a subi un incendie dans l’un des appartements. Le maire a saisi, sur le fondement de l’article L. 511-3 du code de la construction et de l’habitation, le juge des référés du tribunal administratif qui a prescrit une expertise pour décrire l’état de l’immeuble en cause et donner son avis sur l’existence d’un péril grave et imminent. Ce rapport a donné lieu à un premier arrêté du maire interdisant l’occupation de l’immeuble puis à un second arrêté, abrogeant le précédent arrêté, constatant l’état de péril imminent de l’immeuble et interdisant l’occupation et l’utilisation des trois premiers étages. La société demande au juge d’annulé cet arrêté. Le tribunal a condamné la ville à indemniser la société en réparation de ses préjudices. La commune relève appel de ce jugement. De son côté, la société sollicite une meilleure indemnisation de ses préjudices. Pour rappel, selon l’article L. 511-3 du code de la construction et de l’habitation, dans sa rédaction applicable au litige, en cas de péril imminent, le maire, après avertissement adressé au propriétaire, demande à la juridiction administrative compétente la nomination d’un expert qui, dans les vingt-quatre heures qui suivent sa nomination, examine les bâtiments, dresse constat de l’état des bâtiments mitoyens et propose des mesures de nature à mettre fin à l’imminence du péril s’il la constate. Si le rapport de l’expert conclut à l’existence d’un péril grave et imminent, le maire ordonne les mesures provisoires nécessaires pour garantir la sécurité, notamment, l’évacuation de l’immeuble. Dans le cas où ces mesures n’auraient pas été exécutées dans le délai imparti, le maire les fait exécuter d’office. En ce cas, le maire agit en lieu et place des propriétaires, pour leur compte et à leurs frais. Le maire avait-il, comme l’a estimé le tribunal administratif, une inexacte application de ces dispositions ? Pour la cour, le juge de première instance a eu tort. Le juge observe en effet que le rapport d’expertise judiciaire a constaté en particulier la destruction de la toiture de l’immeuble et la dégradation de la charpente suite à l’incendie survenu dans l’appartement situé au troisième étage également détruit. L’expert judiciaire a relevé le très bon état du plancher situé au niveau du deuxième étage et des désordres non structurels tels que des microfissures sur la façade et une dégradation du revêtement du palier au premier étage. Il a aussi préconisé une interdiction d’occupation de l’immeuble à l’exception du local commercial situé au rez-de-chaussée et disposant d’une entrée indépendante de l’immeuble. Par contre, ce rapport a aussi signalé que la charpente et la couverture de l’immeuble devaient être entièrement refaites, que les parties restantes de la toiture et de la charpente étaient carbonisées et fragilisées, que les gravats présents devaient être évacués et qu’il y avait lieu de prendre les mesures nécessaires pour éviter les chutes de tuiles ou de parties endommagées menaçant la sécurité sur la voie publique. Ainsi, selon le juge, le maire a pu estimer, en l’état des connaissances dont il disposait sur le danger constitué par l’immeuble au vu de cette expertise, et en l’absence de tout autre élément porté à sa connaissance et qui aurait remis en cause cette analyse, que l’état de la propriété présentait un risque pour la stabilité du bâti ou pour la sécurité des occupants et de la voie publique et était de nature à justifier l’usage de ses pouvoirs de police spéciale relevant de l’article L. 511-3 du code de la construction et de l’habitation. Le fait qu’un rapport de la société, établi postérieurement à l’arrêté de péril, ait conclu à l’absence de désordres structurels au premier et au deuxième étages de l’immeuble tout en confirmant, au demeurant, des dégradations structurelles importantes et irrémédiables au troisième étage ne démontrait pas que le maire avait commis une illégalité fautive et pris une mesure disproportionnée au regard de l’état réel de l’immeuble. La commune est donc fondée à soutenir qu’elle n’a, en édictant l’arrêté de péril imminent, commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité.